Pour une impératrice ou un empereur au Japon ? Une succession incertaine

Tradition ou modernisation ? Entre un changement de branche dans la dynastie nippone ou l'accession au trône d'une femme, la succession de l'empereur Naruhito pourrait être synonyme d'une nouvelle ère. Le parlement souhaite ouvrir le débat.

Tradition ou modernisation ? Entre un changement de branche dans la dynastie nippone ou l’accession au trône d’une femme, la succession de l’empereur Naruhito pourrait être synonyme d’une nouvelle ère. Le parlement souhaite ouvrir le débat.

La guerre pour le trône est déclarée. Comme ce fut le cas durant des siècles, tous les moyens sont bons pour être couronnés. Au Japon, c’est une réforme constitutionnelle qui pourrait être à la base de cette révolution. Et pour cause, la loi salique (rédigée entre 486-496), qui interdit aux femmes un avenir royal, est désormais reconsidérée au pays du Soleil levant. Le Premier ministre, Yoshihide Suga, est plus réservé.

Dans un entretien accordé à la radio Nippon Broadcasting System Inc., enregistré le 18 décembre 2020 et diffusé le 3 janvier 2021, le chef du gouvernement japonais déclarait :

« Au vu des circonstances actuelles [liées à la pandémie de la Covid-19, NDLR], la succession réservée aux hommes devrait rester une priorité »

Yoshihide Suga, Premier ministre japonais, à la Nippon Broadcasting System Inc., le 3 janvier 2021

Pourtant, la priorité évoquée par le Premier ministre n’est pas celle du parlement. Depuis plusieurs décennies, la Diète souhaite débattre dans son assemblée de l’ouverture de la succession aux femmes. L’objectif : ne pas fragiliser la dynastie Yamato. En effet, l’empereur Naruhito n’a qu’une fille, Aiko. Soumis à la loi salique, c’est donc le frère de l’empereur, Fuhimito, 55 ans, qui devrait s’emparer du trône du Chrysanthème. Il a d’ailleurs été intronisé prince héritier le 8 novembre dernier.

85 % des Japonais favorables à une femme sur le trône

Mais l’Histoire a déjà prouvé qu’un seul successeur potentiel n’est pas suffisant. Ainsi, le fils du prince héritier, âgé de 14 ans et l’oncle du l’empereur, 85 ans, sont eux aussi légitimes. Le risque est toutefois de rompre avec la stabilité de l’État. La solution serait donc que la fille de Naruhito accède à la couronne.

Selon un récent sondage de 2020 de l’agence de presse Kyodo, 85 % des nippons accepteraient la présence d’une femme sur le trône impérial. En septembre 2019, ils étaient 74 % à répondre « oui » à la question : « Accepteriez-vous l’avènement d’une femme sur le trône ? », révèle le site Nippon.com dans son enquête. Et cette femme, ce serait la princesse Aiko, âgée de 19 ans.

La princesse Aiko, 19 ans, pourrait être la prochaine souveraine du Japon. (Crédit : Imperial Household Agency of Japan/Handout via Reuters)

Bien que l’opinion publique porte une vision de modernisation qui imposerait une réforme constitutionnelle, une autre alternative est possible : la primogéniture masculine. Autrement dit, les hommes pourraient toujours devenir empereur, mais dans l’éventualité où il n’y aurait plus d’héritier mâle pour la succession, alors une femme pourrait monter sur le trône.

Cependant, l’ancien Premier ministre, Shinzo Abe (2012-2020), ainsi que son camp conservateur est contre toute forme de changement à la tradition. Les débats se poursuivent. Investi en 2019, le 126e empereur du Japon n’a donc pas fini de se demander à qui les clés du royaume reviendront. Le nom de l’ère sous laquelle Naruhito s’inscrit prévoyait pourtant la « belle harmonie » (Reiwa en nippon). Pour la succession, il faudra donc veiller à la retrouver…

Le 10 novembre 2019, l’empereur nippon Naruhito et sa femme Masako ont fêté leur avènement. (Crédit : Jiji Press)